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  • Photo du rédacteurFabien

Sweet Tooth Tome 1

Dernière mise à jour : 15 mars




  • Résumé :

Dix années ce sont écoulées depuis la mystérieuse pandémie qui frappa la Terre et décima la quasi-totalité de la population. De celle-ci, naquit une nouvelle espèce : mi-homme mi-animale.


Gus fait partie de ces enfants hybrides dont on ignore tout, livré à lui-même depuis la mort de son père. Au cours de son voyage à travers une Amérique dévastée, Gus croisera la route de Jepperd, homme massif et taciturne avec qui il se met en quête d'un refuge spécialisé. Mais sur leur route, les chasseurs sont nombreux.


  • Critique :

En 2009, un peu avant que le virus « The Walking Dead » ne sorte des planches de son comics pour se propager à travers nos écrans, Jeff Lemire créé sa propre épidémie conduisant à un monde post-apocalyptique et sombre qui le fera définitivement entrer comme un auteur qui compte dans le milieu de la bande dessinée américaine : « Sweet Tooth ».

L'auteur conclura son récit 4 ans plus tard à l'issue du 40ème numéro d'un comics qui a rapidement atteint le rang de référence moderne culte pour nombre de lecteurs.



L'histoire prend place quelques années après le début de l'épidémie. Une épidémie dont on sait très peu de choses sur sa nature et le moyen de transmission. Deux faits sont cependant certains :

  • Dès lors que la maladie se déclenche (et elle se déclenchera généralement tôt ou tard chez chacun), aucun effort ne pourra sauver la personne qui en souffre.

  • Des êtres hybrides, animaux humanoïdes, ont commencés à naître de parents humains au même moment que l'apparition de la maladie, à laquelle ces hybrides sont immunisés.

Et dans ce contexte d'une humanité condamnée à relativement court terme, les survivants désespérés par la fatalité de leur sort faisant ressortir leurs plus bas instincts s'en prennent, évidemment, aux fragiles hybrides – tous encore enfants – qu'ils jugent pour responsables de la situation.

Que ce soit par pure haine de l'Autre, pour satisfaire quelque déviance, ou encore pour des expériences pour tenter de confirmer un lien avec la maladie et trouver un remède, les humains instaurent un climat de danger permanent pour ces petits êtres, en faisant une espèce menacée au même titre qu'eux-mêmes.

Et l'Homme restant dans tous les cas un loup pour l'Homme, et sans société pour les encadrer, au lieu de se recentrer sur eux-mêmes les humains se déchirent plus que jamais.


« Sweet Tooth » est donc une œuvre très dure dans laquelle aucun personnage n'est à l'abri de la violence.

Le lecteur suit Gus, un hybride cerf qui depuis sa naissance a été éduqué (chose rare chez les hybrides plus souvent sauvages) et protégé des dures lois de cet univers par son père l'obligeant à vivre reclus. Mais à la mort de ce dernier, Gus décide d'aller explorer au delà de sa forêt et ne tardera pas à comprendre le coût de cette nouvelle liberté. Heureusement pour lui il tombe rapidement sur Jepperd, force de la nature qui proposera tout d'abord à l'enfant de l'emmener dans un refuge pour les hybrides comme lui avant que ce voyage ne se transforme en quête à la d'origine pour l'un et de rédemption pour l'autre.


Cette traversée au milieu d'une civilisation perdue nous fera rencontrer de nombreux personnages qui se cherchent, passant par moults états d'âme avant de trouver qui ils sont réellement au fond, de juste se retrouver pour certains, se confrontant souvent avec la notion de "Pardon" qui est l'un des grands thèmes de ce comics.

Mais cela se fera rarement sans heurt, généralement dans une immense violence même, pour parfois finir comme une blague cynique du destin qui après de nombreuses épreuves visant à mettre la personne à terre lui présentera un oasis dans la seule intention de lui couper définitivement l'herbe sous le pied juste au moment où il commencera à se relever, à reprendre espoir et goût à la vie.


Aucun cadeau ne sera fait aux émotions du lecteur qui n'aura pas plus de repos que les personnages tout au long de l'aventure.

Mais pour contrebalancer le ton il y a le protagoniste : naïf positif, curieux et bavard (et gourmand, d'où son surnom de "Sweet Tooth" dont j'ai des réserves sur la traduction "Gueule sucrée"). Grâce à Gus et son impact sur son entourage, Lemire arrive à distiller beaucoup de poésie et à proposer des moments de douceur et d'optimisme. Certes ces instants sont éphémères mais il permettent de ne pas plomber le lecteur et de proposer une belle lecture sur l'importance de profiter du présent quand celui-ci est favorable.


Il y a aussi le Docteur Singh (et ses yeux qui me font penser, dans un tout autre genre, à certains personnages perdus, fatigués et hagards de Claire Bretécher ou bien Philippe Bercovici) : personnage crucial, cassé, en questionnement constant sur le sens de son existence et qui aura un développement passionnant de part son tiraillement entre science et mysticisme.

Car sans en dire trop, « Sweet Tooth » mélange habilement le côté terre-à-terre de la survie pure à une quête plus grande que l'Homme et apportant beaucoup d'éléments mystiques d'un folklore qui m'était totalement inconnu car peu utilisé. Un axe qui surprend au premier abord, puis comme Singh on en vient à réfléchir sur la place de la spiritualité aux côtés de la science.


Bref un très beau récit, à la structure classique mais regorgeant de messages, qui sait prendre son temps quand il faut et a su s'arrêter à temps pour ne pas trop en faire, sur un épilogue avec lequel Jeff Lemire referme parfaitement les portes de son univers.



Et j'en viens maintenant à un point qui freine beaucoup les lecteurs potentiels : les dessins.

Si l'on prend un tome (surtout le premier) et qu'on regarde quelques pages un peu rapidement, il est fort possible que la première réaction soit un rejet de l'artistique. Ce fut mon cas, et pour en avoir discuté je sais que c'est un à priori qui ne vient pas que de moi.

« Sweet Tooth » est de ces bandes dessinées qui est faite pour être lue pour émettre un avis pas juste feuilletée ; et quand on se décide à plonger dedans on se rend compte que Jeff Lemire est certes un dessinateur atypique, mais certainement pas un mauvais dessinateur (et qui s'améliore tout au long des 40 numéros).

Son trait est brut, dur et dérangeant, donc en parfait accord avec l'univers dépeint. Il l'adapte régulièrement aux situations pour servir sa narration, que ce soit le flashback d'un enfant ou une séquence de rêve par exemple.

Lemire est en plus assez généreux sur ses nombreux environnements, détaillés et crédibles. Environnements qui servent parfois de fond de page pour marquer une ambiance (un orage, une journée enneigée, …) par dessus laquelle viennent se placer d'autres cases de l'histoire rendant l'atmosphère palpable jusque dans les gouttières.

À cela viennent s'ajouter les couleurs de José Villarubia, très réussies surtout sur les plus grands dessins aux moments suspendus comme un lever ou coucher de soleil.


Mais c'est surtout sur le découpage, aspect qu'on ne distingue pas facilement en la parcourant rapidement, que l'œuvre prend toute sa dimension.

L'artiste expérimente beaucoup sur les sens de lecture au sein des pages, les cases qui se réduisent, s'étirent ou encore se répètent intelligemment pour nous faire ressentir des événements, comme l'arrivée d'une simple averse qui semble se mettre à tomber comme une fatalité de plus sur les personnages. Il nous propose même à plusieurs reprise une lecture en paysage sous forme de conte illustré (pas les chapitres les plus évident à lire en gros tomes reliés).

Tout est toujours extrêmement lisible et fluide et garde le lecteur investi avec ces séquences l'invitant à poursuivre sans relâche son chemin avec Gus et Jepperd.


On comprend d'ailleurs d'autant plus pourquoi la collaboration régulière avec Andrea Sorrentino sur d'autres séries marche si bien, avec cet auteur déjà lui-même adepte des renouvellements d'expériences visuelles.


  • Conclusion :

On ouvre Sweet Tooth comme la boîte de Pandore : en prenant au visage tous les maux de son monde et de ses personnages, pour finalement y distinguer au plus profond de ses pages la douce lueur de l'espoir.

Un concentré de noirceur poétique qui dure juste ce qu'il faut pour nous conter efficacement sa fable Garçon et du Grand Costaud, illustrée de dessins en totale harmonie et riche de nombreuses expérimentations graphique.


Fabien.

 

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